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De la nature du jeu / Lettre au joueur

De la nature du jeu / Lettre au joueur

Il est beau d’observer de grandes parties d’eSport assis confortablement devant son PC, à tel point que l’on se demande souvent comment font ces joueurs pour être aussi doués, mais est-il beau de se servir du jeu vidéo seulement pour ce qu’on appelle le skill ? Alors qu’une vive clameur provient de mes écouteurs, un interlocuteur m’insultant sur ma façon de jouer et, surtout car il n’avait aucun arguments, je commençais alors à m’interroger. Ce que nous appelons vidéo-ludisme est-il aujourd’hui l’affaire seule de la notion de talent ou appartient-il encore à l’amusement ? Le jeu vidéo aurait-il entièrement dérivé de sa source ?

L'eSport, le Colisée du 21ème siècle.
L’eSport, le Colisée du 21ème siècle.

De part son origine, l’activité vidéo-ludique est un loisir non-réservé à une certaine caste de joueurs que nous nommeront « élite ». Ainsi on ne différenciera ici aucun joueur, quelque soit sa console, son PC ou son Mac, car on viendrait alors à placer avantages et handicaps sur la tête de chacun. Par étymologie du mot, le ludique est un amusement conféré par l’activité même, provenant du but original de, je l’espère, n’importe quel jeu qui soit.

Avec les avancées techniques, le gameplay des jeux s’est amélioré, bien qu’il stagne ces temps-ci contrairement à ce que le Culte de l’Indé puisse dire (je vous conseille ainsi l’excellent billet suivant sur le sujet : Le Problème Indé). Ces avancées en matière d’immersion et d’intuition dans le jeu ainsi que les poussées vers les Open World où sont présent plusieurs choix et classes au cours du jeu, permettent à chacun de créer sa propre histoire ainsi que d’apprendre les bases de plusieurs archétypes de personnage : le guerrier, le mage, le voleur… Ainsi que leurs spécialisations. Au terme de recherche parfois infructueuses, même le joueur lambda pourra retrouver une certaine redondance dans sa manière de jouer : c’est ce qu’on va ici nommer « le skill ». En effet, celui-ci peut se trouver très haut comme très faible, on détourne donc la notion de talent par le gameplay du joueur, qui se différencie ainsi du gameplay de base au jeu.

Avec l’essor du multi-joueur, ce skill peut être mesuré par des bases informatiques immenses et un système de scoring, mais comme dit plus haut, ce système de jeu est récurrent et stagne depuis plusieurs années. La redondance est équivalente à la perte d’originalité et mène à la sensation d’ennui du joueur qui, au final, quittera très certainement le jeu. Doit-on donc jouer pour le skill ? Normalement, on acquiert des compétences de jeu à force de jouer, mais il existe non pas une mais plusieurs façons de jouer. Cela ne tient qu’à la personne qui se trouve derrière l’écran. Or il n’est pas question de gagner ce skill, mais de jouer pour lui et j’ai extrêmement de mal à écrire le verbe « jouer » quand j’exprime cette notion. Si on joue pour le talent, on ne joue pas pour soi mais pour une notion totalement abstraite car à ma connaissance aucun jeu n’est développé pour ça : de beaux paysages, des personnages attrayants, un univers palpitant… Certes, on peut s’amuser à se lancer des défis dans un MMO, tel qu’être niveau maximum le plus rapidement possible ou avoir un maximum d’argent me direz-vous, mais là il n’est pas question de gagner du skill car il faut d’ors et déjà en posséder un minimum pour réussir un tant soit peu ces quêtes. De plus, le fait de jouer pour « être le meilleur » est une forme de besoin totalement inutile. A terme, il y a sans doute un sentiment de satisfaction éphémère qui débouche à nouveau sur une entrée dans la redondance et mène à l’ennui du joueur.

Revenant sur le paragraphe précédent et tout simplement pour m’expliquer, les jeux d’arcades, SHMUP et autres Mario ne sont pour moi, même avec le système de scoring, pas des jeux fait pour le talent. Mon développement est simple : les machines d’arcade elles sont faites pour un niveau de jeu élevé afin que le joueur dépense des crédits, or grand nombre d’enfants dans la tranche d’âge 5-12 ans se ruent (ou du moins se ruaient) sur ce type de machine. Certes il y a de la compétition entre deux enfants par exemple, mais un enfant qui joue, comprend t-il les mécanismes du jeu ? Non, il joue pour son propre amusement tout d’abord, ensuite vient la phase où il se met au défi face à la machine. Ainsi, si le besoin d’avoir du talent dans un jeu peut exister (en effet je ne nie pas son existence), il est très secondaire car même en la présence d’enfants, qui sont généralement moins développés au niveau des besoins que les adultes, leur intention première est le jeu et non pas ses mécanismes et ses buts.

Se battre soit-même à répétition n'apporte pas les effets souhaités à répétition.
Se battre soit-même à répétition n’apporte pas les effets souhaités à répétition.

Vous aurez compris je l’espère que je ne réfute pas l’existence de personnes qui ne jouent que pour le talent. Ce que j’exprime simplement c’est que le jeu vidéo n’est pas fait pour ça, parce que justement c’est un jeu. Au travers de mes différents articles ainsi que de lectures je me suis rendu compte qu’on essayait de cerner le jeu vidéo sur un seul de ses aspects, alors qu’il faut le voir dans sa globalité.

Pour conclure, n’est pas un joueur celui qui veut juste être bon, mais celui qui s’immerge dans la bonne humeur et l’amusement total.

Sleipnir.

PS : Ce billet ne reflète que mon avis et non celui du site entier. Si vous souhaitez converser ce texte, je me ferai une joie de vous répondre par commentaire.

4 COMMENTS

  1. Article intéressant, et je me permets de faire un parallèle avec mon expérience du moment sur le jeu de cartes de Blizzard, Hearthtstone.

    Une partie perdue et voilà mon classement qui chute. Mécontent, je relance une partie, je me dois de rattraper cela! Je perds de nouveau, la colère monte petit à petit. Quid de l’échange avec mon adversaire? La partie était belle, cela s’est joué de peu et je n’ai pas démérité. C’était plaisant et pourtant je ne retiens que le résultat final: ma défaite.

    Tout ça pour dire que l’esprit de compétition n’est pas un mal, loin de là, mais quand il est le moteur qui nous pousse à jouer, on perd sans doute quelque chose d’essentiel: le plaisir de jeu. Je travaille là-dessus en ce moment, essayer de rester compétitif sans pour autant oublier que je m’amuse, dans la défaite comme dans la victoire (un peu plus dans ce dernier cas, certes :p).

    • On peut être victorieux sans être le meilleur, mais il est vrai que l’esprit de compétition et/ou la colère nous pousse à jouer pour que l’on prouve notre supériorité face au jeu et pas seulement à l’adversaire.
      Rappelons nous que le joystick est la meilleure arme de l’amusement et non celle de la rage 😛
      C’est tant mieux si tu arrives à maintenir cet état d’équilibre, tu as bien de la chance face à certains !

    • Mais ce genre de remarque s’adapte à tout, au sport le premier. Quand tu fais un match et que tu le perds, peut importe à quel point il était beau, tu as perdus et tu penses surtout à ça. Sauf si tu joues entre potes.

      Mais ça ne s’arrête pas qu’au sport. Dans tous les « jeux » où tu mets quelqu’un en compétition, le perdant sera le plus souvent déçu. Échecs, sport, jeux de sociétés ou jeux vidéos, tu reviens toujours à la même équation: l’Homme n’aime pas perdre.

      Tu me diras que tu peux jouer pour jouer. Mais c’est le cas lorsque tu ne joue pas pour la compétition, mais pour le jeu. Comme par exemple quand tu fais une soirée, mettons, Tekken, avec cinq copains. Peut importe qui gagne, ou comment tourne les manettes, tant que tous se marrent et jouent à tour de rôle. Tu perds, pas grave, tu passes la manette et tu prend celle du suivant, …
      Mais si tu joues à Tekken dans le cadre d’un tournoi lors d’une convention, et que tu perds, peut importe que ton match soit beau ou pas, tu as perdu, et c’est fini.

      Quel intérêt à être le meilleur dans un jeu? Le même qu’à être le meilleur dans un sport, ou dans ta classe. Le goût de la compétition, et surtout le besoin de supériorité sur le reste de ses congénères.

      Donc au final, ce n’est pas un problème propre au jeu vidéo. Être le meilleur, c’est un but dans tous les divertissements possible, à partir du moment où tu mets en avant la compétition.

      • Ah mais je suis tout à fait d’accord, sauf que je parle bien dans le cas précis où on joue soit tout seul, soit avec ses amis ou sur WoW. Là ce ne sont pas des compétitions ou quoi que ce soit et je ne pense pas qu’il y est un intérêt certain.

        De plus le sujet est le jeu vidéo en général, et chaque jeu n’est pas compétitif, or certains prennent tout les jeux pour des jeux compétitifs (je garde bien ton terme). C’est ce problème là que je fais ressortir. C’est sur qu’il y a cet instinct de compétition, mais ne prend t-il pas trop le dessus par rapport à l’amusement ? Un jeu qui ne m’apporte rien d’autre que de la compétition, qui ne me permet pas de me divertir et/ou de m’épanouir, pour moi ce n’est pas un jeu. Il y a en effet des limites à ne pas franchir.

        Autrement je reste d’accord avec toi.

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