Enfin !! 18 ans après l’inoubliable Carmageddon, un remake du jeu de course le plus trash de l’histoire arrive dans nos contrées . Ô joie ! nous allons pouvoir reprendre le volant de ces voitures customisées pour découper du piéton et nous entretuer dans la bonne humeur et l’hémoglobine. Passé par la case Kickstarter, ce Carmageddon Reincarnation est alléchant sur le papier, mais voyons voir ce que le bébé de Stainless Games a sous son capot à pointes.
Fais honneur à tes ancêtres (mais pas tous)
Passage obligatoire de toute review d’un monstre du jeu vidéo remis au goût du jour: le portrait des anciens. Carmageddon premier du nom, déjà développé par Stainless en 1997, fut sûrement le jeu de course le plus marquant de son époque et pas uniquement pour son style unique. Le concept est simple, il y a 3 façons de terminer une course : passer par tous les checkpoints et terminer premier à la fin, écraser tous les piétons présents sur la carte ou éclater tous les adversaires. On s’en doute, tout est fait pour que le joueur ne privilégie pas la première option: éclabousser les différents parcours de sang de piétons rapporte de l’argent, et défoncer les adversaires peut permettre de remporter leur voiture (certains possèdent des attributs très pratiques comme le rayon électrique tuant tous les piétons du coin automatiquement). De plus, si ces actions de destruction sauvage sont réalisées avec inventivité et violence, des bonus sont attribués.
Surtout, Carmageddon fut le premier jeu de course en « open world ». Toute la carte est accessible, il est d’ailleurs encouragé de sortir de l’itinéraire prévu pour aller récupérer les power-up les plus intéressants, débusquer des packs de piétons et autres joyeusetés. De surcroît, la gestion physique des véhicules, des impacts avec déformation en direct de la carrosserie, et de la conduite à mi-chemin entre simulation et arcade en font un précurseur sur beaucoup de domaines. Malgré les différentes interdictions dues à la violence totale proposée (écraser une mamie pendant qu’elle crie « moi j’ai fait la guerre! » puis laisser un tas d’intestins sanglants au milieu du trottoir n’est apparemment pas du goût de tout le monde, étrangement) Carmageddon rencontra un énorme succès d’estime. Suffisant pour en faire un second, un peu plus joli, avec de nouvelles cartes et véhicules mais des piétons plus coriaces, remplacés en France par des zombies (merci au patch très facilement trouvable pour le passage aux piétons classiques). Puis vint l’affront, l’épisode de trop avec Carmageddon: The Death Race 2000, au sein duquel des missions étaient à réaliser (comme faire exploser un requin géant), particulièrement mauvais. Seul opus non réalisé par Stainless, tout l’esprit irrévérencieux disparaît et laisse place à un level design d’une pauvreté incroyable.
Mutiler avec son temps
Carmageddon Reincarnation a donc vu le jour pour fournir au fan un nouvel épisode tant attendu, respectant « l’esprit Carma » tout en s’ajustant à la mode 2015. Il reprend les mêmes bases et y ajoute quelques modes de jeu pour diversifier l’expérience, mais foncièrement les nouveautés sont minimes. On retrouve donc une dizaine d’environnements au sein desquels on s’adonnera à l’explosion de concurrents en masse et à la figure de style sur piéton. Les courses sont réparties sur 16 niveaux, chacun composé de 3 épreuves : une course classique, une course au piéton (atteindre 10 points en écrasant les piétons indiqués ou en les volant aux adversaires en les éclatant) ou une course aux checkpoints (même principe, mais avec des checkpoints). Autant l’avouer tout de suite, les nouveaux modes de jeu sont parfois agaçants en solo mais intéressants en multi avec des potes. Le passage au niveau suivant s’effectue lorsqu’on a amassé assez de deniers au cours de ces joutes métalliques. Autre légère différence avec l’original, pour faire évoluer votre voiture, ce ne sera plus d’argent dont il faudra se séparer, mais de jetons d’augmentations disséminés un peu partout sur les maps.
Le moteur et les graphismes ont été revus, avec un résultat…décevant pour être poli. Même si on ne s’attend pas à une merveille graphique, Carmageddon Reincarnation pique les yeux. Très fort. En parallèle, les temps de chargement sont trèèèèèès longs, même sur un PC haut de gamme. Et enfin, le jeu n’est pas du tout optimisé : même si le passage de la beta à la version finale marque un gap certain, de nombreux ralentissements et parfois plantages se font sentir. Impossible donc de jouer en qualité ultra sur une machine supportant des jeux bien plus beaux.
Mais soit, je suis un grand fan de la première heure, ce ne sont pas des graphismes datés qui vont me faire reculer, puisque je joue régulièrement au premier pour évacuer certaines pulsions liées à la ligne 13 du métro parisien. C’est alors parti pour des courses endiablées, où le bruit de la tôle froissée et des moteurs geignants n’est couvert que par les cris (inénarrable « Wouhouhouhou!!! ») Des piétons destinés à périr sous les roues crantées de nos monstres mécaniques. Durant les premières chevauchées, le constat est agréable, le feeling est bon, on fait l’impasse sur une conduite qui n’a pas évolué d’un iota depuis 15 ans. C’est le style Carma et on aime ça. Après quelques heures de jeu, le constat est plus amer. On rit moins, on s’énerve davantage, puis on le met de côté pour reprendre le seul et unique Carmageddon.
Vivement les patchs
Le sentiment de frustration se dégage tout d’abord des paliers à atteindre pour passer au niveau suivant, qui oblige à refaire plusieurs fois la même course. Pas grave en soit car cela allonge la durée de vie et ça nous permet de profiter pleinement des maps, mais le montant à atteindre est trop élevé. On s’en aperçoit aux alentours du 4e ou 5e niveau, car les adversaires n’ont qu’un seul objectif: vous déboîter de manière répétée et violente. Ainsi, on est souvent confronté à 2, 3 voire 4 concurrents qui viennent se frotter à vous successivement, sans avoir ces quelques secondes de répit pour s’échapper. Quand les flics viennent s’y ajouter, on peste de se faire déconstruire morceau par morceau.
La colère arrive ensuite, au moment d’une dure prise de conscience : tous les adversaires sont plus forts que vous. Leurs caisses vont plus vite, font plus mal et sont plus résistantes que la votre. On se fait donc littéralement retourner dans tous les sens et détruire très souvent. Heureusement, la fonction de réparation est là, pourrait-on penser. Mais se réparer coûte cher, et se réparer continuellement pendant 10 minutes coûte très cher. Nombreuses seront les courses où, par abnégation pure, on réussira à sortir vainqueur uniquement pour se rendre compte qu’on a obtenu un score négatif. On doit donc retourner dans l’arène, pour essayer d’enfin sortir la partie parfaite qui nous fera nous rapprocher du montant visé. En cours de route, on aura bien tenté de remplacer notre voiture qu’on soupçonne d’être en papier mâché contre celle d’un concurrent durement gagnée au combat, mais en vain. Une fois en votre possession, elle sera toute aussi faible que la voiture d’origine, malgré les augmentations installées.
Niveau sonore, ça ne casse pas 3 pattes à un canard unijambiste. Les bruits des moteurs sont quelconques, le gros rock qui tâche anecdotique et les effets sonores sont une simple mise à jour des effets du jeu original. Il ne reste qu’à espérer de la part des développeurs que des patchs d’équilibrage et d’optimisation soient en cours de réalisation, sous peine de voir le jeu purement abandonné par les joueurs.
Un massacre pour la route
Ce Carmageddon Reincarnation nous met donc dans uns posture délicate. D’un côté, le fan que l’on est a envie de passer du temps dessus et de profiter de cette renaissance d’une franchise unique. D’un autre côté, le joueur averti, habitué à un minimum de jouabilité et d’équilibre, est vite lassé de courir après l’argent en essayant d’éviter les 5 tarés qui n’en veulent qu’à notre pot d’échappement. En l’état actuel, il ne sert que de revival à l’esprit indécent et trash, et n’est limite qu’un faire-valoir pour le Carmageddon original. Ca tombe bien, il est offert lors de l’achat de ce remake passablement réalisé. Pour ceux qui ne connaissent pas, c’est l’occasion de faire son premier massacre routier.
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