Alien Isolation – Dans l’espace personne ne vous entendra flipper
Initiée en 1979 avec Alien Le Huitième Passager de Ridley Scott, la franchise Alien vient régulièrement nous faire des piqûres de rappel sur à peu près tous les types de médias existants: bandes dessinées, films, figurines et bien sûr jeu vidéo. Depuis 35 ans, le xénomorphe s’impose comme le maître de l’horreur spatiale. Ces dernières semaines, est sorti Alien Isolation, dernier bébé de la franchise ayant la lourde tâche de devoir faire oublier le camouflet infligé à l’immense communauté de fans qu’était le pitoyable Aliens Colonial Marines de Gearbox Software.
Avec à sa tête l’équipe de The Creative Assembly à qui l’on doit l’excellente série des Total War, Alien Isolation se veut comme un retour aux origines, aux fondements de la saga: l’horreur. Ici, point de marines bodybuildés, pas de grosses pétoires dignes du Vulcan Raven de Metal Gear Solid… Pour preuve, l’héroïne du titre n’est autre qu’Amanda Ripley, fille d’Ellen, la figure mythique des films interprétée par la non moins mythique Sigourney Weaver dans les baskets de laquelle nous évoluerons durant la vingtaine d’heures du soft. Retour aux sources pour la saga qui comblera les fans mais pas seulement! Bienvenue dans l’espace, là où personne ne vous entendra flipper…
Abordons rapidement le volet technique. J’évolue sur un Asus Republic Of Gamers avec un processeur Core i7, une GeForce GTX 880M… et Oculus Rift. Autant vous le dire tout de suite: pour l’immersion, rien de mieux… pour la peur aussi! Jouant sur PC, je ne peux donc traiter des nombreux bugs ayant sévi sur console, notamment sur PlayStation 4. Mais quitte à faire un petit écart: pour la next-gen, rien de mieux que le PC! Maintenant chers lecteurs, place à l’horreur.
2137, depuis quinze ans, Amanda Ripley recherche désespérément sa mère Ellen, portée disparue suite aux événements d’Alien Le Huitième Passager. Quinze ans de recherches infructueuses et frustrantes jusqu’au moment où La Compagnie (immense conglomérat de pourris que l’on retrouve dans chaque volet de la franchise) vient la chercher pour lui apprendre que la boîte noire du Nostromo, le vaisseau de sa mère a été retrouvée sur la station Sevastopol (rien à voir avec la station du métro Parisien). Et bien sûr, à bord de la station, elle retrouvera le pire cauchemar de sa mère et très prochainement le sien…
Passée la cinématique d’introduction et sa reprise de la typographie Alien (prends ça dans ta face Prometheus), c’est par une douce entrée en matière que l’on débute dans la peau d’Amanda. Si le but de The Creative Assembly avec cet Alien Isolation est de revenir aux sources horrifiques de la franchise, le tout est réalisé de façon subtile. Lors des premiers chapitres du jeu, le joueur se surprend même à guetter l’arrivée du xénomorphe, un climat de confiance s’installe malgré les nombreux ennemis présents sur la station. Car si dans l’espace personne ne vous entendra crier, sur Sevastopol, tout le monde ou presque voudra vous tuer. La station étant en cours de démantèlement, vous aurez maille à partir avec des androïdes plus proches du Terminator que du gentil Bishop et des anciens employés insurgés mécontents et effrayés par un curieux meurtrier qui sévit depuis quelques semaines. Ambiance ambiance… Pour résumer, le joueur aura constamment le sentiment d’être en danger, d’être traqué et avec l’apparition du célèbre monstre, ce sentiment ne sera que renforcé.
Jouer à Alien Isolation, c’est un peu comme être visiteur du Jurassic Park en 1993: on a envie de voir le clou du spectacle mais dès qu’il pointe le bout de ses griffes, on regrette notre empressement. En effet, dès que le xénomorphe entre en jeu, la moindre de vos erreurs se traduit par une mort aussi impressionnante que sadique. L’intelligence artificielle du monstre a été pensée pour non pas suivre un chemin prédéfini mais pour traquer le pauvre joueur, accroché à sa manette, le souffle coupé et une sueur moite ruisselant le long de son échine! Vous apprendrez à marcher sur des œufs, à vous servir du mythique détecteur de mouvement aperçu dans la franchise au cinéma depuis le premier volet et surtout à vous cacher au moindre bruit, à la moindre ombre aperçue. Le joueur commence à courir? Il est mort! Il ne trouve pas rapidement un abri? Il est mort! Il n’a plus de munitions? Il est mort! Enfin, pour les munitions, autant le dire tout de suite, elles ne serviront que contre les humains et les synthétiques… Le xénomorphe est immortel, rapide, puissant et s’il détecte le joueur, IL EST MORT! La peur, la vraie!
C’est avec l’arrivée du xénomorphe que les mécaniques du jeu se mettent alors réellement en place, le joueur n’aura alors qu’un seul but: survivre jusqu’à la prochaine sauvegarde! Et comme The Creative Assembly semble être aussi sadique que la star de son jeu, le level design ne sera clairement pas votre allié. Si des casiers, des tables, des bureaux ou encore des armoires seront parsemés un peu partout comme des îlots de sûreté dans une mer de danger, que dire du système de sauvegarde? Dans Alien Isolation, les points de sauvegarde seront représentés par des bornes d’appel d’urgence… urgence, dans laquelle le joueur sera constamment placée à l’approche d’un point de sauvegarde qui deviendra dés lors un saint graal, une récompense pour la torture psychologique endurée dans la phase précédente. Pas de checkpoint, pas de pitié et comme mentionné plus haut dans ces lignes: la moindre de vos erreurs sera fatalement punie. Pour résumer: il est impératif de sauvegarder dès que faire se peut. Beaucoup diront que ce level design se montre archaïque, il n’en est rien, tout est fait dans ce jeu pour représenter le sentiment de faiblesse, d’impuissance de l’humain face à ce prédateur intraitable n’éprouvant, contrairement au joueur, aucune peur. Pour paraphraser Nick Fury: « fourmi < botte ». Bien évidemment, le joueur évoluera le plus souvent dans des environnements clos, sombres dans lesquels trappes et conduits d’aérations ne seront que des points d’arrivées possibles pour notre chasseur. En un mot comme en cent, tout a été conçu dans ce jeu pour instaurer un climat de peur, d’insécurité et de frustration. Pauvre petit joueur…
Bien que sombre, il est intéressant de noter que les environnements s’intègrent avec justesse à tout ce que nous aurons pu voir au travers de 30 ans de saga Alien. Avec des graphismes poussés à leur maximum sur PC, le jeu se révèle extrêmement beau comme un témoin du grand soin et de l’immense respect que portent les équipes de The Creative Assembly aux films de la franchise. Arpenter la sombre Sevastopol vous rappellera les couloirs du Nostromo du Huitième Passager et les allées de la station Hadley’s Hope d’Aliens. Si l’ambiance graphique et la toute-puissance du xénomorphe sont en soi de belles marques du respect apportées à la saga, le fait d’entendre à nouveau le score composé en 1979 par Jerry Goldsmith pour le premier film émerveillera les oreilles en plus d’apporter son lot de nostalgie. Car là réside l’une des forces du titre, son intégration au sein d’une franchise trans-générationnelle. Et si les éléments cités plus haut ne sont pas des arguments suffisants, certaines séquences du jeu raviveront chez le joueur des souvenirs enfouis dans les tréfonds de la planète LV-426.
L’un des principaux reproches effectué à l’encontre du fade Aliens Colonial Marines était la pauvreté de son gameplay. Alien Isolation tente de rectifier le tir, parfois avec brio, parfois de façon nettement plus brouillonne. Amanda se révèle maniable et ses avancées dans les conduits d’aérations et autres trappes ou couloirs sont agréables. Bien évidemment, la course étant généralement synonyme de mort, le fait de marcher et de devoir souvent rester accroupi donne une impression de lenteur malheureusement frustrante devant l’étendue de la station Sevastopol. Et les couloirs de la station spatiale ne seront pas les seuls que le joueur arpentera dans le jeu: par le biais d’interfaces informatiques, il pourra aussi naviguer dans le réseau de communication de la base, pirater certaines sécurités pour ouvrir des portes et pouvoir progresser ou encore y lire et y entendre des rapports permettant d’en apprendre un peu plus sur l’histoire du jeu.
Alors que l’arsenal proposé s’inspire plus de ce que l’on voit dans le premier film, il est intéressant de noter que certaines règles établies dans les films suivants se retrouvent intégrées dans le soft. Le détecteur de mouvements sera votre allié inconditionnel, le lance-flamme sera dès son acquisition votre nouveau meilleur ami! Lors des phases de combat, le joueur alternera entre des armes à feu aux munitions faméliques, des armes contondantes à la puissance limitée et enfin des pièges et autres bombes se révélant aussi efficaces que létales si le joueur les utilise de façon astucieuses. Enfin, au niveau du xénomorphe, la meilleure des défenses reste la fuite… et la peur.
Si au niveau de son arsenal, le jeu n’innove guère, c’est bien de par son inventaire et son utilisation que la nouveauté arrive. Mines, bombes en tout genre ou même items de soin, tous ces objets dont le joueur aura besoin, il lui faudra les créer dans un menu spécialisé en fonction des objets qu’il aura trouvé dans les différents recoins du décor. Cette nécessité de devoir collecter chaque ingrédient renforce l’immersion du joueur, son sentiment de solitude et bien sûr la pression qu’il endure! Ils sont sadiques chez The Creative Assembly!
L’histoire quant à elle ne surprendra guère les plus fins connaisseurs de l’univers Alien mais elle apporte tout de même son lot de rebondissements sympathiques et bien évidement le célèbre quatrième acte « surprise » propre à la franchise. Il est bien sûr évident que ce n’est pas par son gameplay, ses graphismes ou son level-design que le jeu se démarque mais par son ambiance. Et c’est là que réside la principale qualité du jeu: la sensation d’immersion que vivra le joueur, renforcée par l’utilisation de l’Oculus Rift rend l’aventure prenante, viscérale et chaque réussite du joueur relèvera d’un acte de bravoure.
Il est impossible bien sûr de conclure ce test sans parler des fonctionnalités liées à l’Oculus Rift. Car avec le casque de réalité virtuelle sur le nez, le joueur aura l’impression de vivre le même enfer qu’Amanda. De plus, avec les ajouts portés par le DK-2, la caméra de détection de mouvements sera prise en compte, notamment lors des nombreuses phases de cache-cache avec le xénomorphe. Pour un jeu dont les principaux points forts sont l’ambiance et l’immersion, autant dire que jouer à Alien Isolation avec l’Oculus Rift est un bonheur sans nom!
En conclusion, cet Alien Isolation s’impose comme l’une des meilleures adaptations vidéo ludiques de la mythique franchise. Avec une progression linéaire mais rythmée par différentes phases de jeu variées, le soft impose une ambiance et une immersion peu comparables. Si son système de sauvegarde, son inventaire daté et sa difficulté peuvent donner un sincère sentiment de frustration, jouer à Alien Isolation révèle du plaisir malsain, celui de jouer à se faire peur.
Petit bonus, le trailer du jeu: